Emission radio sur le projet, le jeudi 20 octobre 2016 à 22h sur La Première dans Le Monde Invisible (par Ouïe-dire): lien podcast: http://podaudio.rtbf.be/pod/lp-pod_par_ouc3af-dire_26466849.mp3
Une donation/exposition (seconde partie)
La première partie de cette donation/exposition avait eu lieu à l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles durant le printemps 2015. Les Ets. Decoux, sous l’intitulé Le Tour du monde: soustractions, y avaient présentés 79 objets réalisés pendant 15 ans par Didier Decoux. Les objets étaient donnés aux visiteurs intéressés en échange d’un contre-don à formuler selon un protocole préétabli.
Nous nous étions portés acquéreur d’une pièce en échange de la mise à disposition de l’Eté 78 pour y présenter la 80è pièce: une édition venant refermer le cycle et reproduisant notamment les 79 objets montrés précédemment. Nous avons également offert d’exposer et de disséminer la vingtaine de pièces (retravaillées pour l’occasion) qui n’avaient pas été données précédemment.
C’est à cela que nous vous convions: un don d’oeuvres, un questionnement sur les circuits du marché de l’art, la présentation d’une édition….un voyage autour du monde et le retour, à l’heure juste.
Informations pratiques:
– Vernissage jeudi 20 octobre de 18h à 21h, ouvert à tous sans rendez-vous;
– Samedi 22 octobre: ouvert de 14h à 18h et présentation de l’édition à 17h (ouvert à tous sans rendez-vous), par les Ets. Decoux.
– Vendredi 28 octobre de 18h à 21h: Finissage et remise des dons: ouvert à tous sans rendez-vous;
– En dehors de ces horaires: visites sur rdv via : mailto:info@ete78.com
C’est au printemps 2015 que nous avons rencontré le travail des Éts. Decoux.
À l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles (ArBA), sous l’intitulé Le Tour du monde : soustractions, 79 objets étaient exposés dans une vaste salle, au sol, sur des tables, contre les murs. Réalisées par Didier Decoux il y a environ quinze ans et retravaillées par les Éts. Decoux avant cette exposition, les différentes pièces étaient librement inspirées par le Voyage autour du monde en 80 jours de Jules Verne. En bois, caoutchouc, matériaux divers assemblés, parfois peints, toujours à taille humaine, elles semblaient être des outils de mesure, de construction, des instruments de pesage, de traçage, de traction, des leviers… Fruits de plusieurs années de travail, les Éts. Decoux les avaient toutes rassemblées et les donnaient au public en échange d’un contre-don à formuler selon un protocole préétabli.
Nous nous sommes portés acquéreurs d’une pièce en échange de la mise à disposition de notre salle pour y présenter l’édition conçue par les Éts. Decoux comme la 80e pièce venant refermer le cycle et reproduisant notamment les 79 objets montrés à l’ArBA. Nous avons également offert de disséminer les dernières pièces n’ayant pas trouvé acquéreur lors de leur première présentation.
Plusieurs éléments nous ont intéressés dans ce projet :
Tout d’abord la proposition du don/contre-don est directement entrée en résonance avec le fonctionnement de notre lieu. En effet, nous accueillons et finançons des projets en dehors des circuits commerciaux de l’art pour permettre aux artistes de développer un travail qu’ils n’auraient pas pu réaliser ailleurs. S’agissant de mécénat, nous ne vendons rien, les artistes gardant l’entièreté du produit d’une vente éventuelle. Mais en contrepartie, nous recevons une œuvre choisie par l’artiste. L’échange avec le public est également important pour nous puisque, en dehors du vernissage et d’évènements ponctuels, l’Été 78 n’est accessible que sur rendez-vous, encourageant explications, questions, commentaires et échanges. L’idée des Éts. Decoux de soustraire, par le don, ses objets du marché de l’art n’est pas pour nous déplaire. Se soustraire pour être présent et proposer une alternative (ou un complément ?) au système actuel du marché de l’art est une idée qui nous semble intéressante à développer.
Ensuite, de par nos activités professionnelles, nous sommes impliqués, notamment, dans le développement de modes économiques alternatifs tels que, par exemple, l’économie de la fonctionnalité (où, via la location, on travaille sur l’usage et l’utilisation d’un produit plutôt que son acquisition). Le projet des Éts. Decoux résonne particulièrement avec ces nouveaux développements. Le don/contre-don renvoie à des notions économiques anciennes, le troc notamment, mais est aussi tourné vers le futur conviant des notions de rencontre, d’intérêts communs partagés, de communauté, de partage d’un produit, de règles exprimées (ou pas) à respecter… Les Éts. Decoux interrogent le circuit habituel production-stockage-exposition d’une œuvre d’art. Il nous semble plus pertinent que jamais de remettre en question les circuits économiques classiques et de rechercher de nouveaux modèles. C’est certainement vrai pour nos circuits de consommation traditionnels mais aussi, sans doute, pour le marché de l’art.
Également, les objets eux-mêmes : ils semblent être utiles, prêts à être maniés ou assemblés à d’autres. Ils semblent avoir été façonnés et assemblés pour une utilisation précise et concrète. D’une grande créativité, mais aussi d’une grande simplicité, ils questionnent notre regard et demandent à être manipulés pour les comprendre. Pas vraiment un leurre, ils se révèlent (ou pas, finalement) dans leur esthétisme simple et particulier qui les rend uniques, mystérieux et attachants. Une grande partie de ces pièces sont maintenant disséminées et entre les mains de différentes personnes. Elles vivent leur vie selon un protocole établi par les Éts. Decoux, obligeant notamment les acquéreurs à exposer la pièce choisie, à la faire vivre.
Finalement, le rapport au temps nous est apparu intéressant dans la démarche des Éts. Decoux. Le temps a permis de révéler un corpus d’objets longtemps stockés à l’abri des regards. Le temps a permis de créer et donner du sens à une œuvre. Le temps a permis de réfléchir, de prendre du recul et n’a rien effacé. Les pièces ont été réalisées sur plusieurs années, parfois retouchées plusieurs fois pour être finalement données à l’occasion de deux manifestations. La seconde, à l’Été 78, se caractérise par la présentation de l’édition conçue par les Éts. Decoux pour documenter l’ensemble de la démarche, relater son développement, répertorier les pièces et permettre ainsi de garder une sorte d’unité globale malgré la dissémination tant temporelle que spatiale des objets. Cette édition vient boucler le travail, à l’image du retour à l’heure juste de Phileas Fogg qui met fin à son voyage autour du monde. La publication crée de nouveaux liens entre les objets mais aussi avec le public, elle est un point final au projet mais également une prolongation temporelle et physique de celui-ci. Elle acquière un statut particulièrement intéressant dans ce contexte.
À l’occasion de l’exposition à l’Été 78, les Éts. Decoux disséminent la vingtaine de pièces non encore données lors de la présentation à l’ArBA. Pour l’occasion, certaines auront été retravaillées une dernière fois. Le système du don/contre-don restera d’application: chaque visiteur pourra se déclarer désireux de recevoir une pièce. S’il est choisi donataire, il lui incombera d’en prendre soin et de prévoir une forme de réciprocité, un contre-don qui soit de nature à soutenir les activités artistiques des Éts. Decoux.
Le livre :
TM/S 2112. Documents 1996-2016, Éts. Decoux Éditions, 2016, 160 p., 28 x 36 cm., impression digitale N/B et couleurs, 80 ex. numérotés 1 à 80 et 40 ex. numérotés I à XL.